12.9.08

Exposition photo à Ixelles : Esclaves au Paradis

A partir du 20 Septembre prochain, vous pourrez aller admirer cette exposition photo exceptionnelle de Céline Anaya Gautier à la Chapelle de Boondael, Square du Vieux Tilleul n°10 (tél 02 515 67 18), et ce jusqu'au 16 Octobre.
L’association "Pour Que l’Esprit Vive" s’est donné comme priorité d’utiliser la photo pour favoriser la prise de conscience par le public des problèmes sociétaux et leur transformation. De tous les mediums de communication, la photo est sans doute le plus objectif pour montrer les injustices et a un impact plus fort pour en dénoncer les causes.
Le contexte : Chaque année, des milliers d’haïtiens fuient en République Dominicaine dans l’espoir d’une vie meilleure. Ils tentent d’échapper à la misère qu’ils connaissent dans leur pays. La grande majorité d’entre eux n’ont pas de papiers et ne peuvent pas entrer légalement en République Dominicaine. Des réseaux très organisés de passeurs et de buscones (trafiquants haïtiens et dominicains) leur font miroiter des emplois illusoires et leur demandent des sommes exorbitantes pour leur faire passer la frontière. Les buscones soudoient les fonctionnaires afin que les travailleurs migrants sans papiers puissent passer les postes de contrôle militaires mis en place pour les intercepter. Après avoir traversé la frontière, un grand nombre de ces travailleurs sont emmenés dans des bateys (baraques pour les ouvriers des plantations sucrières). Ils font ainsi partie des 30 000 ouvriers employés chaque année en tant que saisonniers dans l’industrie de la canne à sucre. Ceux qui ne réussissent pas à trouver un emploi dans le secteur agricole tentent leur chance ailleurs, par exemple dans le bâtiment. Malgré leur emploi, de nombreux immigrés haïtiens sont expulsés en raison d’une mauvaise application de la législation sur l’immigration. Des haïtiens sont régulièrement arrêtés par la police, par les services de l’immigration ou par l’armée et renvoyés massivement en Haïti sans que soient examinés leurs papiers ou leur situation au regard de cette législation. La discrimination fondée sur la nationalité ou la race aggrave encore ce phénomène. Les autorités recourent en effet au profilage racial pour arrêter les immigrés sans papiers. Les jeunes hommes noirs sont les principales victimes de ces méthodes expéditives. Même lorsqu’ils possèdent un visa en cours de validité, une carte de résident permanent ou la nationalité dominicaine, ils sont renvoyés de force en Haïti car les autorités considèrent automatiquement que leurs papiers sont faux. On estime à environ 500 000 le nombre de femmes, hommes et enfants prisonniers des bateys. Les traversées des braceros haïtiens résultent d’un processus clandestin, perpétré avec la complicité des offices de migrations, des autorités dominicaines et haïtiennes, ainsi que de trois familles intraitables de propriétaires : les Vicini, les Campollo et les Fanjul. Nombre de ces migrants restent pris dans ce système et passeront le reste de leur vie dans des bateys insalubres. Les braceros travaillent quinze heures par jour, sans garantie de salaire ; les plus expérimentés parviennent à couper une tonne et demie de canne, payée à peine 1 euro en ticket de rationnement. Les femmes, elles, tentent d’assurer la survie du batey, tandis que les enfants d’haïtiens nés en République Dominicaine ne sont reconnus par aucun des deux gouvernements. On estime à 250 000 les enfants apatrides en République Dominicaine. Céline Anaya Gautier et Esteban Colomar ont pu s’introduire dans ces plantations grâce à deux prêtres, Christopher Hartley et Pedro Ruquoy, qui ont travaillé quotidiennement sur le terrain pour accompagner et défendre ces hommes réduits en esclavage.
Le thème difficile de l'exposition lui donne un caractère particulièrement fort et s’inscrit pleinementdans le cadre d’une politique en faveur du développement durable auquel laCommune d’Ixelles a souscrit au travers de sa «Déclaration de Politique générale». C'est sur l’initiative combinée de M.Willy Decourty, Député-Bourgmestre, de Mme Delphine Bourgeois, Echevinede l’Europe, et de moi-même que le Collège a décidé d’offrir une première bruxelloise à cette expositiond’envergure qui a déjà bouleversé la France. Le Collège des Bourgmestre et Echevins d’Ixelles ne pouvait pas rester insensible aux questionssuscitées par le travail mené par Céline Anaya Gautier et Esteban Colomar. C’est cette volonté de s’impliquer activement dans les problématiques du développement durable qui a mené le Conseil communal à ratifier la Charte d’Aalborg+10* en décembre dernier ouencore à s’associer à la campagne «Rue du Commerce Equitable», un projet d’ampleur européenne.Le développement durable se définit comme un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Il s’appuie sur trois piliers - économique, social et environnemental - et se base sur une solidarité dans le temps (entre les générations) et dans l’espace (entre pays du Nord et pays duSud). Il requiert une participation de tous les acteurs sociétaux. Dans cette logique citoyenne et afin de poursuivre la réflexion, l'Espace Senghor et l’ASBLE changes & Synergie organisent une après-midi thématique autour du «prix moral» du sucre, le 12 octobre à partir de 15h00. La programmation prévoit un documentaire, un film et un débat avec la présence exceptionnelle du Père Ruquoy. Adresse: chaussée deWavre 366 - 1040 Bruxelles. Tél: 02 230 31 40.